Jeux olympiques 2024 de Paris: une révision budgétaire sous haute surveillance de l’Etat

A vingt mois des Jeux olympiques et paralympiques de Paris, la révision budgétaire du comité d’organisation (Cojo) s’est faite sous haute surveillance de l’Etat qui remet un peu au pot pour aider un comité touché par l’inflation et des coûts sous-estimés. 
Lundi après-midi, le conseil d’administration doit entériner ce sur quoi transpire la direction financière du Cojo depuis des semaines, en liaison avec le comité international olympique (CIO) et l’Etat. Il devrait acter un budget en hausse de 10% (+400 millions d’euros) à 4,380 milliards d’euros, à 96% d’origine privée (recettes des sponsors, billetterie et contribution du CIO). 
Avec le budget de la Solideo (société de livraison des ouvrages olympiques) à 4,3 milliards pour l’instant (dont 1,870 milliard d’argent public), la facture globale des JO de Paris pourrait donc s’établir à 8,7 milliards d’euros, contre 6,8 milliards projetés en 2019.
En tout cas, depuis l’arrivée d’Amélie Oudéa-Castéra, ministre des JO, l’Etat, garant en cas de déficit du Cojo, « serre les boulons », ont rapporté plusieurs sources à l’AFP. Le Cojo avait déjà fait une révision budgétaire fin 2020, avec 300 millions d’euros d’économies à la clé. 
Mais cette fois, l’inflation galopante a rendu plus difficile l’exercice. 
« Ils n’étaient pas très en avance et la conjoncture s’est détériorée, s’ils avaient signé leurs contrats avant, ils auraient échappé à ça », explique à l’AFP une source proche du monde olympique. L’inflation compte pour près de la moitié dans la hausse, avec 120 millions d’euros pour cette année et 75 millions d’euros pour 2023 et 2024, a détaillé le Cojo.  
– Malédiction du vainqueur de l’enchère –
Mais les organisateurs ne sont-ils pas aussi victime de « la malédiction du vainqueur de l’enchère »? Comme l’explique l’économiste Wladimir Andreff, le pays qui remporte la compétition auprès du CIO pour organiser les JO en sous-estime systématiquement le coût. Il doit ensuite sans cesse réévaluer la facture. « Le budget est sous-évalué », assure plusieurs sources à l’AFP depuis des mois.
Certaines lignes augmentent régulièrement. C’est le cas de la sécurité, passée de 195 à 295 millions en 2020, et à 320 millions d’euros en cette fin décembre. 
De son côté, la ministre des JO a aussi pudiquement évoqué « la complexité de cahiers de charge un peu sous-estimés ». En clair, les contrats coûtent plus cher que prévu. 
« Quand on organise des épreuves au Grand Palais, on a par exemple besoin d’occulter la verrière pour tenir compte des exigences de la retransmission », a expliqué Amélie Oudéa-Castéra au Sénat le 2 novembre, ce qui n’avait « pas été anticipé ». 
De même, l’idée d’externaliser et de confier à des tiers la réalisation des épreuves — coeur de métier d’un comité d’organisation — n’a pas fonctionné comme prévu. Plusieurs prestataires attendus ont jeté l’éponge sous le poids des contraintes du CIO ou de craintes liés à la responsabilité. En attendant, le temps à filé et les prix ont monté. 
Autre hic: la masse salariale, avec « des métiers en tension » dans l’événementiel sportif, qui peuvent monnayer cher leur arrivée à moins de deux ans de l’évènement.
– « Aveu de faiblesse » –
Le comité a d’ailleurs recruté « un directeur exécutif des opérations » en la personne d’Edouard Donnelly, et n’en a pas fait grande publicité. Venu du monde de l’évènementiel, il a travaillé avec Etienne Thobois, actuel directeur général. « Il vient un peu en pompier », croit savoir une source proche du monde olympique. 
En face de ces dépenses qui augmentent, il faut à la fois faire des économies et trouver des recettes. 
Le patron du Cojo, Tony Estanguet, a glissé la semaine dernière que l’Etat se « mobilisait pour aller chercher de nouveaux partenaires ». « Un aveu de faiblesse », selon un observateur, qui y voit aussi un signe de reprise en main de l’Etat. Mais le Cojo assure être « en avance » sur ses objectifs et va inscrire lundi 127 millions d’euros supplémentaires à la ligne partenariats. Plusieurs sources affirment néanmoins à l’AFP que « contrairement à ce qu’ils disent, ils sont vraiment à la bourre ».
Le Cojo va aussi mettre en vente davantage de billets et plus chers pour certaines épreuves, ainsi que puiser 115 millions d’euros dans sa réserve pour aléas. 
Il a aussi reçu le coup de pouce de l’Etat et des collectivités (ville de Paris, Métropole du Grand Paris) notamment pour l’organisation des Jeux paralympiques mais aussi des dépenses liées à la lutte antidopage. Ainsi 111 millions d’euros d’argent public vont se rajouter aux seuls 100 millions d’euros de dotations publiques. 
Le livre de comptes devrait être plus grand ouvert début 2023 quand sera débattu au Parlement un rapport de la Cour des comptes qui n’a pas encore été rendu public.  
dec/jr/smr

La ministre des sports et des JO de Paris 2024 Amélie Oudéa-Castéra et le président du comité d'organisation Tony Estanguet, le 30 août 2022 à Saint-Denis, près de Paris

La ministre des sports et des JO de Paris 2024 Amélie Oudéa-Castéra et le président du comité d’organisation Tony Estanguet, le 30 août 2022 à Saint-Denis, près de Paris

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