Mondial: l’orchestre belge redoute la fin du bal

Obtient-on « onze guerriers » avec des esthètes du football ? Longtemps dépositaires d’un jeu offensif et séduisant, les Belges doivent surmonter des limites et frustrations personnelles devenues criantes s’ils veulent battre les Croates jeudi et poursuivre leur chemin dans le Mondial-2022.
« Individuellement, on était beaucoup plus forts avant, on faisait beaucoup plus de différences », constatait mardi Eden Hazard, en capitaine désenchanté qui soulignait déjà le déclin de son équipe avant d’aborder le Mondial, écho à sa propre marginalisation depuis trois ans au Real Madrid.
Défaitiste ou simplement lucide, le diagnostic a été amplement confirmé par la laborieuse victoire face au Canada (1-0) et par la défaite face au Maroc (2-0), la première pour cette génération de surdoués en phase de poule d’une Coupe du monde.
Car Eden Hazard, Kevin de Bruyne, Thibaut Courtois, Axel Witsel ou Romelu Lukaku n’étaient que des enfants la dernière fois que les Diables Rouges sont sortis avant les huitièmes de finale d’un grand tournoi, au Mondial-1998 puis à l’Euro-2000.
Depuis leur avènement, les Belges ont dominé le classement mondial Fifa pendant trois ans, atteint les quarts du Mondial-2014 et des Euros-2016 et 2020 et pris la troisième place du Mondial-2018, défaits par les futurs étoilés bleus.
– De Bruyne veut « la perfection » –
Et s’ils n’ont raflé aucun trophée, ils ont longtemps régalé par leur jeu audacieux, rapide et créatif, empilant respectivement 9 et 7 buts lors des phases de poule du Mondial-2018 et de l’Euro-2020.
Alors leur dégringolade qatarie ne tient pas seulement aux scores: proches de la noyade face aux vagues adverses, négligents sur coups de pieds arrêtés, timorés à la relance et imprécis en attaque, les Belges ressemblent aux fantômes de leurs belles années, et rien ne garantit que le retour face aux Croates de leur attaquant vedette Romelu Lukaku, revenu d’une rechute à la cuisse gauche, comblera tous les manques.
Plus étonnant encore, leur seul but inscrit face au Canada, sur une ouverture en profondeur du défenseur Toby Alderweireld pour Michy Batshuayi, a ulcéré Kevin de Bruyne, agacé par l’abus de longs ballons et qui l’a vertement fait savoir à Aldeweireld comme à son sélectionneur Roberto Martinez.
« Je sais que mes réactions ne sont pas toujours bonnes », a reconnu le maestro de Manchester City le surlendemain, s’avouant « frustré » et « parfois inquiet » du niveau de jeu des Belges. « Je devrais le montrer moins, même si c’est la perfection que je recherche ».
Le caractère bougon et entier du « Diable Roux », aussi exigeant avec lui-même qu’avec les autres et capable de jouer le dernier Euro après une opération du visage et avec une cheville blessée, est tout sauf une nouveauté.
– « Nous ne créons pas beaucoup » –
Sauf que sur le terrain, KDB manque pour l’heure de justesse, tandis qu’Eden Hazard bataille avec ses limites actuelles, orientant intelligemment le jeu et bataillant pour conserver le ballon sans pouvoir reproduire dans le dernier tiers ses accélérations dévastatrices de 2018.
Alors les remarques des deux leaders passent mal, y compris quand Hazard pointe en plaisantant face à la presse la « lenteur » de la charnière Aldeweireld (33 ans)-Jan Vertonghen (35 ans), pourtant évidente depuis des années, à la veille de Belgique-Maroc.
« Beaucoup de choses me passent par la tête maintenant, mais ce sont des choses qu’il vaut mieux ne pas dire devant une caméra », a répliqué Vertonghen après le match sur la chaîne Sporza, le ton aigre. « Nous ne créons pas beaucoup devant, presque rien en fait. Cependant, nous avons beaucoup de qualité. Peut-être aussi que nous attaquons mal parce que les gars-là sont trop vieux ».
Face aux rumeurs d’altercation dans le vestiaire, Hazard et le portier Thibaut Courtois sont venus assurer mardi que les Belges avaient aplani leurs différends. « Bien sûr, je me suis toujours bien entendu avec Jan ! Je n’oserais pas me battre avec lui, il est plus grand que moi », a rigolé Hazard.
Dans leur camp excentré de Salwa Beach, où les joueurs se réjouissaient au début du tournoi de pouvoir préserver « leur bulle », les Diables ont offert à la presse un quart d’heure d’entraînement ponctué d’éclats de rire. A l’exception de KDB et Hazard, qui s’étiraient séparément, et devront guider la révolte jeudi.
cfe/ng/bde

Kevin De Bruyne le 29 novembre 2022 à Doha

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Thibaut Courtois le 30 novembre 2022 à Doha

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